Dossier réalisé par Laurent de
chez grospixel.com
(donc pas celui m'epaulant ;). Je les remercie de m'avoir permis
de publier leur dossier sur mon site :)
Shigeru Miyamoto est le principal responsable du succès rencontré
par Nintendo ces vingt dernières années. Rien de moins.
La liste des jeux qu’il a créés est tout simplement
époustouflante. Derrière cette créativité
bouillonnante se cache un homme simple, grand rêveur devant
l’éternel, qui ne cherche rien d’autre qu’à
nous donner la clé de son univers intérieur, celui-ci
ayant la particularité de n’avoir pratiquement pas changé
depuis son enfance. |
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Une histoire hors du commun
Le 16 novembre 1952 , Shigeru Miyamoto vient au monde à Sonebe, petite
commune rurale voisine de Kyoto, au Japon. L’environnement dans
lequel il grandit est verdoyant : collines, rizières, lacs.
Il se passionne très tôt pour la lecture, le dessin et
la peinture, mais pratique aussi le base-ball.
L’un de ses souvenirs d’enfance les plus marquants est
la découverte d’une caverne dans la campagne, près
de chez lui. Il lui faut y retourner de nombreuses fois avant de trouver
le courage d’y entrer. Finalement, muni d’une lampe de
poche, il descend dans la grotte, et y découvre un passage
vers une autre caverne. Cette aventure va faire lentement son chemin
dans son esprit.
Comme ses parents ne possèdent pas de télévision
ni de voiture, il prend fréquemment le train pour Kyoto, en
quête de divertissement : boutiques, cinémas, ou plus
simplement pour se promener dans la rues sans but précis. Il
découvre les premiers classiques de Walt Disney, comme Blanche
Neige ou Peter Pan, et se fait des amis sur place. Lorsque ses parents
déménageront finalement pour Kyoto, Shigeru n’est
donc pas dépaysé.
Désireux de devenir un artiste un fois atteint l’âge
adulte, il travaille beaucoup, cherchant sa vocation, hésitant
entre la comédie, la peinture ou les spectacles de marionnettes.
Shigeru et son banjo; l'école des arts appliqués de Kanazawa Munici
A 18 ans, il entre à l’école des Arts
appliqués de Kanazawa Munici, mais ne se rend guère
aux cours, préférant passer son temps à travailler
sur ses bandes dessinées ou écouter de la musique.
L’obtention du diplôme lui prendra, à cause de
cette dispersion, cinq ans. Entre temps, il a appris à jouer
de la guitare et se produit, au côté d’un joueur
de banjo, dans des piano-bars ou des fêtes.
En 1977, il demande à son père de prendre contact
avec une de ses relations dans le but de le faire entrer chez
Nintendo, le fabriquant de jouets numéro 1 au Japon. L’ami
du père n’est autre qu’Hiroshi Yamauchi, président
de la compagnie, qui accepte de faire passer un entretien à
Miyamoto, bien que n’ayant pas besoin de nouveaux illustrateurs.
A l’issue de la rencontre, Yamauchi est assez enthousiasmé
par le travail de Miyamoto pour lui demander de revenir avec d’autres
créations.
Lors du deuxième entretien, Miyamoto apporte des croquis
dessinés entre temps, représentant d’éventuels
projets de jouets, parmi lesquels un portemanteaux à usage
des enfants, une horloge amusante pour les parcs d’attractions,
ou une balançoire permettant à 3 enfants de jouer
ensemble. Yamauchi est impressionné par son ingéniosité
teintée de naïveté, et l’engage comme
directeur artistique. Miyamoto se retrouve dans un département
chargé d’évaluer et de modifier les créations
de la compagnie avant qu’elles ne soient mise en production.
Radars et Gorilles
En 1980, la production de jeux d’arcades venus des
USA s’est ralentie, et Minoru Arakawa, président de
Nintendo of America, demande à Yamauchi de mettre ses meilleures
équipes au travail pour accoucher d’un hit qui pourrait
relancer ce marché. Le jeu qui va, dans un premier temps,
répondre à ses attentes sera Radarscope. Mis en «
arcade test » dans divers endroits aux USA, le jeu reçoit
un accueil très favorable, et Arakawa en commande 3000 exemplaires
à Nintendo of Japan.
Radarscope
Hélas, l’acheminement des machines prend 4 mois, et
lorsqu’elles arrivent, l’engouement qu’elles avaient
suscité auprès des joueurs qui avaient testé
le jeu est passé. Seul un millier d’unités sont
vendues, et Nintendo of Japan doit revoir sa copie. Tous les designers
les plus expérimentés de la compagnie sont occupés
par divers projets, et Yamauchi, qui considère le marché
Américain comme non prioritaire, ne désire pas les
écarter de leur travail. Il décide alors de mettre
à l’épreuve le petit nouveau qu’il vient
d’engager : Shigeru Miyamoto.
S.Miyamoto à l'époque de ses débuts chez Nintendo
C’est la première fois que Miyamoto se penche
sur la conception d’un jeu vidéo. Il voit là
la possibilité de s’exprimer dans le cadre d’une
forme d’art qui, dans un certain sens, recoupe toutes celles
qui le passionnent depuis son enfance. Cependant la plupart des
jeux vidéo, en ce début des années 80, sont
des jeux de tir ou de sport. Miyamoto déplore leur simplisme
: Pas de personnages identifiables, pas d’histoire, pas de
contexte artistique intéressant. Son ambition va rapidement
être de faire des jeux vidéo qui pourraient rivaliser
avec ses films préférés, comme « King
Kong » ou « Jason et les Argonautes », et il décide
de laisser tomber complètement le concept Radarscope, ce
qui est plutôt mal perçu par ses collègues.
Après s’être informé sur les limitations
techniques des machines d’arcades alors fabriquées
chez Nintendo, Shigeru décide de s’inspirer de King
Kong en faisant intervenir dans son jeu un gorille géant.
L’idée du kidnapping d’une jeune fille par ce
gorille lui vient de La Belle et la Bête, le film de Jean
Cocteau, qu’il adore. Apprivoisé par un charpentier,
qui ne le traite pas forcément toujours avec les meilleurs
égards, le gorille se révolte contre son maître
et capture sa fiancée. Ce sera au joueur d’incarner
le charpentier parti délivrer la belle.
Le métier de charpentier attribué au héros
se justifie par l’environnement du jeu : Des immeubles en
construction, que le gorille a pu facilement escalader, et du haut
desquels il projète toutes sortes d’objets au charpentier
qui tente de les grimper.
Lorsque le charpentier parvient à atteindre le gorille, celui-ci
s’échappe, la fiancée aux bras, vers le niveau
suivant, le jeu en comprenant quatre au total.
Croquis préparatoire de Miyamoto pour Donkey Kong
Les spécifications techniques indiquées par
les ingénieurs chargés de la réalisation à
Miyamoto précisent que le héros sera, à l’écran,
de toute petite taille, et qu’il est important que les différentes
parties de son corps se distinguent facilement grâce à
des couleurs vives et contrastées. Miyamoto l’habille
donc en conséquence : Ses mains sont munies de gants, et
il porte une casquette rouge, qui évite d’avoir à
représenter ses cheveux. Pour mettre en valeur son visage,
il l’affuble d’un gros nez et lui fait porter une grosse
moustache marron. Comme ses bras ne pourront pas se balancer de
façon réaliste, il décide que sa démarche
sera saccadée et maladroite, bras et jambes étant
pratiquement perpendiculaire au corps pendant la course. Peu à
peu, l’aspect rondouillard et comique du personnage s’impose
de lui-même, et Miyamoto réalise qu’il va devoir
privilégier le côté amusant de la situation
décrite par le jeu.
L’équipe chargée du développement
du jeu est dirigée par Gunpei Yokoi, 39 ans, un concepteur
déjà expérimenté, et qui a à
son actif plusieurs succès de la compagnie . Tout comme
Miyamoto, Yokoi est entré chez Nintendo pour y concevoir
des jouets, mais c’est avant tout un électronicien
de génie, doublé d’un visionnaire en matière
de marketing. Sa collaboration avec l’artiste Miyamoto va
aboutir au premier hit mondial de Nintendo dans le domaine du
jeu d’arcade.
Yokoi met en pratique les idées de Miyamoto, qui, pour
cette fois, va revoir ses ambitions narratives à la baisse.
Son premier produit commercialisable s’avère au final
être un jeu d’action simple, prenant, et original,
d’une richesse ludique supérieure à la moyenne
de ce qui se fait à l’époque.
Miyamoto compose lui même la musique qui accompagne
l’action et les jingles. Ceux-ci sont plutôt enjoués
et enfantins, ce qui laisse à penser qu’à ce
stade du développement, il a laissé tomber toute ambition
dramatique. Seule l’intro du jeu, montrant le gorille grimper
au sommet de l’édifice avec sa victime dans les bras,
sur une mélodie évoquant les films d’horreurs
des années 30, établit un semblant de scénario
qui dénote avec l’ambiance amusante et simpliste du
jeu. Les premières bribes du style Miyamoto sont là.
Reste alors à trouver un titre pour le jeu. Fidèle
à son idée de départ, Miyamoto propose d’appeler
le jeu King Kong. Hiroshi Yamauchi refuse l’idée,
pressentant que la compagnie se verrait aussitôt traînée
en justice pour violation de copyright, et propose l’appellation
de Monkey Kong. En réalité il fait erreur, car le
copyright déposé par Universal, suite à la
sortie du film King Kong de 1933, porte sur le nom Kong, inventé
de toute pièce à l’époque.
A la dernière minute, pour des raisons difficiles à
éclaircir, le mot Monkey sera écrit Donkey, peut-être
à cause d’une simple confusion. Monkey signifie singe,
mais Donkey signifie maladroit, stupide, et c’est aussi
le mot utilisé pour désigner un âne. Après
le transformation forcée de son héros en petit gros
moustachu, Miyamoto voit le gorille pathétique et terrifiant
qu’il avait désiré devenir comique et ridicule.
Même si Miyamoto est indéniablement le père
de Donkey Kong, le moins que l’on puisse dire est que le
projet lui a échappé, et que le produit final ne
correspond que vaguement à l’idée qu’il
se fait du jeu vidéo du futur. Les raisons de ce glissement
tiennent essentiellement à sa position insuffisamment élevée
au sein de Nintendo et des limitations techniques de l’époque
qui rendent certaines de ses idées irréalisables.
L’avenir se montrera plus propice à l’avènement
de son génie créatif.
Toujours est-il qu’en 1981, Donkey Kong est lancé
et rencontre immédiatement un succès énorme,
surpassent en quelques jours les ventes de Radarscope. Ce dernier
va du reste tomber aux oubliettes définitivement, et provoquer
certains remous dans le staff jeu vidéo de Nintendo. La
plupart des ingénieurs qui avaient dénigré
le travail de Miyamoto et critiqué son détachement
des projets antérieurs à son arrivée donnent
leur démission, ce qui, dans la culture Japonaise, est
à l’époque un geste extrême. Cette épuration
des effectifs va faciliter la montée de Shigeru dans la
hiérarchie de « Big N ». Il se retrouve également
obligé de se plier aux méthodes commerciales éprouvées
de la compagnie, à savoir l’exploitation du filon
qu’il a découvert. Yamauchi le charge de concevoir
la suite de Donkey Kong.
Séquelles et plombiers
Miyamoto décide de réhabiliter le gorille,
qui s’était vu dépeint comme une créature
bête et méchante alors qu’il avait voulu initialement
en faire une victime de la cruauté de l’Homme. Dans
cette séquelle, le charpentier devient le méchant,
et comme il n’est pas possible d’animer l’énorme
gorille du premier épisode et de le faire contrôler
par le joueur, Miyamoto lui invente un fils, chargé de libérer
son papa du joug dominateur de son maître. Deux jeux vont
ainsi mettre en scène le petit gorille, Donkey Kong Junior
et Donkey Kong 3.
Donkey Kong Junior et Donkey Kong 3
Cette inversion des rôles n’est pas du goût
du public, et les deux jeux ne rencontrent pas le succès
espéré. C’est toujours Donkey Kong, premier
du nom, qui attire tous les joueurs dans les salles d’arcade.
Chez Nintendo of America, on s’interroge sur les difficultés
rencontrées par Miyamoto pour imposer ses nouvelles créations,
et la conclusion est vite tirée : Il faut miser sur le personnage
humain de l’histoire. Miyamoto ne s’est jusque là
guère impliqué dans le design de ce personnage, au
point de se contenter de lui donner le nom peu attractif de Jumpman.
Les ingénieurs de NoA travaillent dans un local loué
par la compagnie à un certain Mario Segali, personnage qu’ils
apprécient beaucoup, et auxquels ils sont désireux
de rendre hommage. Ils proposent à Miyamoto de nommer ainsi
le héros et de créer un jeu lui donnant la vedette.
Miyamoto accepte, et, voyant le personnage sous un nouveau jour,
décide de lui faire changer de métier. Mario n’est
plus charpentier, mais plombier. Après tout, tous les plombiers
moustachus sont Italiens, n’est ce pas ?
Nul ne peut dire si ce remaniement du personnage provient
de la seule inspiration de Miyamoto, mais toujours est-il que l’Italie
est une grande famille, donc Mario a forcément un frère,
ce qui tombe bien puisque l’idée de Miyamoto, pour
son prochain jeu, est de faire jouer deux personnes simultanément.
Le frère est baptisé Luigi, et le jeu met en scène
les deux plombiers, qui ont un air de famille si marqué que
seule la couleur de leur tenue de travail permet de les reconnaître,
contre diverses créatures. Au cours du jeu, les frères
sont amenés à collecter des pièces d’or,
le gagnant étant le premier à en obtenir 5.
Le jeu s’intitule Mario Bros et à sa sortie en 1983
casse la baraque. Les gens de NoA ont vu juste, et Miyamoto renoue
avec le succès. Le président Yamauchi est ravi, d’autant
plus que le personnage de Mario semble réunir toutes les
conditions pour servir de mascotte à Nintendo, comme Mickey
le fait pour Walt Disney, son modèle.
En 1984, Nintendo s’est lancé dans le développement
de la NES (Famicom au Japon), console de jeux qui, si elle n’est
pas la première de la compagnie, affiche des ambitions
planétaires alors que tous les autres acteurs du marché
des consoles de jeux sont en perdition ou ont changé de
secteur d’activité.
Hogan's Alley et Wild Gunman sur NES
La NES est une console dont Nintendo se réserve la
possibilité d’en faire un micro-ordinateur, si la demande
se fait sentir, et la compagnie fait un effort de développement
logiciel considérable (les développeurs parallèles
n’interviendront que plus tard).
Fort de ses succès précédents, Shigeru Miyamoto
se voit bombardé chef de la division Joho Kaihatsu, ou «
département amusement » (désignée plus
tard par le sigle EAD), chargée de développer des
jeux révolutionnaires pour NES.
Les premiers titres issus de cette division seront Wild Gunman,
Duck Hunt et Hogan’s Alley, autant de jeux qui utilisent le
pistolet optique de la NES, puis viendront Popeye The Sailor Man
et Excitebike, une course de moto tout-terrain dans laquelle le
joueur peut créer ses propres circuits.
Duck Hunt et Excitebike
Après ces quelques titres intéressants, Miyamoto
et ses ingénieurs vont accoucher d’un classique qui
va changer la face de l’univers du jeu vidéo : Super
Mario Bros, dans lequel Mario et Luigi sont chargés de sauver
la princesse du méchant Bowser Koopa. Pour la première
fois, Miyamoto donne à l’un de ses héros une
véritable quête, qu’il n’aboutira qu’au
terme d’une succession de niveaux qui n’ont rien de
répétitif.
Super Mario Bros 1,2 et 3
L'Aventurier
Shigeru Miyamoto a souvent dit, dans les innombrables interviews
qu’il a données, qu’il aime se promener dans
une ville inconnue sans se munir d’un plan, car des choses
inattendues se produisent alors inévitablement, et sa vie
prend un parfum d’aventure dont il raffole.
Traverser un tunnel sans savoir de quoi sera fait le paysage de
l’autre côté est le genre d’expérience
qu’il recherche. Enfant, il se souvient d’être
parti sur les routes en auto-stop, et s’être amusé
à parcourir les forêts voisines de Kyoto, espérant
tomber par hasard sur un lac ou une maison abandonnée. Le
fait d’être le plus souvent perdu ne l’effrayait
pas, mais au contraire l’excitait.
Ces expériences, ou plutôt leur représentation
dans l’imaginaire de Miyamoto, sont sa principale source d’inspiration.
En ce début des années 80, sa position au sein de
Nintendo et les progrès techniques réalisés
en matière de jeu vont bientôt lui permettre de créer
des jeux conforme à ses désirs. Son but est alors
de faire partager aux joueurs les sensations que lui-même
recherche, persuadé qu’ils ne pourront plus s’en
passer dès qu’ils y auront goûté.
Ce n’est qu’en 1987 qu’aboutira totalement
cette démarche, avec la sortie de The Legend of Zelda sur
NES, le premier jeu de Miyamoto totalement en phase avec sa vision.
The Legend of Zelda permet au joueur placé dans la peau
d’un jeune aventurier nommé Link de partir à
l’aventure dans un immense décor champêtre
peuplé de monstres et merveilles, ou l’inconnu surgit
à tout instant. Sans le savoir, le joueur se trouve alors
dans la peau du jeune Miyamoto parcourant les forêts Japonaises
et voyant tout ce qu’il imagine se concrétiser.
Tous ceux qui ont joué à Zelda savent combien Miyamoto
a réussi dans sa démarche. Le jeu est passionnant
et prenant, ce qui est déjà une réussite
en soi, mais les 6.5 millions d’exemplaires vendus confirment
l’universalité de cette conception du divertissement.
Zelda 1 et 2
Le succès de Zelda permet à Miyamoto de passer
de « Game Director » à « Game Producer
», ce qui lui confère le même statut que Georges
Lucas (pour le cinéma) qui est son modèle (et le producteur
de son film préféré, Raiders of the Lost Ark
de Steven Spielberg), et un autre créateur capable de faire
partager ses rêves d’enfant à son public. La
réussite personnelle de Miyamoto est complète, et
il ne lui reste qu’à pousser toujours plus loin son
concept. Le fait d’être producteur signifie concrètement
qu’il peut travailler sur plusieurs titres simultanément
et former des équipes de développement à sa
guise.
Les jeux sur lesquels ils va travailler comptent des titres tels
que Volley Ball ou Ice Hockey, mais l’essentiel de ses efforts
portent sur les diverses suites de Super Mario et Zelda, qui rencontrent
toutes un succès phénoménal. Super Mario
Bros 3, lancé en 1990, va même rapporter aux USA
500 millions de dollars, un chiffre gigantesque dans le domaine
du divertissement.
Plus de puissance
Après Super Mario Bros 3, Miyamoto s’implique
dans le développement de la nouvelle console 16-bits de Nintendo,
la Super Famicom, ou SuperNES.
Pour la première fois, il se retrouve investi d’une
lourde responsabilité dans le lancement d’une console
Nintendo. Yamauchi compte tout simplement sur lui pour que la SuperNES
sorte accompagnée de jeux aptes à détourner
l’attention des joueurs de la Megadrive de Sega, qui est le
produit branché que tout le monde se doit de posséder.
Super Mario World et Pilotwings, sur SuperNintendo
Avec son équipe de 30 développeurs, Miyamoto
va imaginer et créer une série titres, tous sortis
en 1991, qui vont largement satisfaire les attentes de Yamauchi
: Super Mario World, la course futuriste F-Zero, et un jeu d’action
mettant en scène un avion, Pilotwings. Autant de titres qui
deviennent instantanément des classiques, et se retrouvent
abonnés aux suites et adaptations obligatoires sur toute
nouvelle console Nintendo.
Un an plus tard, c’est le chef-d’œuvre Zelda –
A Link to the Past qui achève de faire de la série
Zelda une franchise au succès universel. Les capacités
graphiques et sonores de la SuperNES donnent au concept ludique
de Miyamoto toute sa dimension, et le jeu est acclamé comme
un des meilleurs au monde, propulsant d’emblée le SuperNES
dans le peloton de tête des consoles 16-bits.
L’équipe EAD, dirigée par Miyamoto, va également
produire deux jeux SuperNES qui connaîtront un énorme
succès : Super Mario Kart et Star Fox.
Super Mario Kart et Star Fox
Le premier confirme que Mario peut aussi faire un carton dans un jeu qui
sort du style plate-forme, et le deuxième laisse entrevoir
des possibilités intéressantes pour la SuperNES dans
le domaine des jeux 3d (aidée il est vrai par le chip Super
FX inclus dans la cartouche du jeu).
Un peu plus tard, Yoshi’s Island, toujours développé
par EAD, confirme que l’univers crée par Miyamoto est
plein de possibilités ludiques, et que ses personnages secondaires
(ici le dragon ami de Mario) sont aussi très appréciés
du public. Cela va permettre à Nintendo de s’inspirer
toujours plus de Disney en déclinant toutes les combinaisons
possibles à partir des idées innovatrices introduites
par Miyamoto (le plus souvent), c’est à dire en lançant
des dizaines de jeux dont les personnages sont déjà
connus des joueurs et qui créent un univers cohérent.
Super Mario All Stars, exemple d'exploitation des personnages créés par Miyamoto
Lorsque Nintendo va se lancer, en 1993, dans le développement
laborieux de sa console 64-bits, Miyamoto va de nouveau jouer un
rôle de premier plan.
Depuis Star Fox, les jeux 3d sont une véritable obsession
pour lui, et la SuperNES ne lui permet pas de mettre en œuvre
toutes ses idées. Comme à ses débuts, il se
retrouve frustré, et le N64 annoncée se présente
pour lui comme un terrain propice à tous les délires
possibles.
L’équipe EAD va mettre 3 ans pour se familiariser avec
le hardware totalement nouveau de la console, et deux de plus pour
mettre au point Super Mario 64, première véritable
conversion en 3d de l’univers ludique de Miyamoto.
Si Miyamoto avait laissé son équipe prendre une part
plus important dans la conception des derniers titres, cette fois,
il supervise tout, et travaille d’arrache pieds. Le résultat
est unanimement considéré comme un jeu révolutionnaire,
le premier où le joueur bénéficie d’une
totale liberté d’action. L’univers graphique
de Mario se trouve parfaitement servi par la 3d, et la jouabilité
atteint des sommets.
Star Fox 64 et Super Mario 64, sur Nintendo64
Un peu plus tard, Pilotwings 64, une autre grande réussite,
confirme que la N64 a un potentiel énorme, ce que les errements
de Nintendo dans son développement avait semblé remettre
en cause. On raconte même que Miyamoto est le sauveur de la
64-bits de Nintendo, le seul à avoir su redonner confiance
aux joueurs.
Wave Race 64, une course de jet-ski, Mario Kart 64 et Star Fox 64
continueront par la suite à alimenter la ludothèque
de la N64 en titres indispensables et sans équivalent.
En 1998, un autre titre développé par EAD sort
du lot : Zelda – Ocarina of Time. Premier épisode en
3d de la série, ce jeu, sur lequel Miyamoto s’est également
beaucoup investi, est un chef-d’œuvre absolu. Sur le
plan ludique, les innovations qu’il apporte sont nombreuses,
mais ce qui frappe surtout est son atmosphère mélancolique,
ses graphismes chatoyants, et le plaisir subtil que l’on prend
à s’y plonger. Il arrive qu’un seul jeu suffise
à justifier l’achat d’une console. Ocarina of
Time en est un exemple.
Zelda 64
En 2000, au salon Spaceworld, Miyamoto annonce qu’il
va se consacrer totalement au développement de la future
console de Nintendo, alors appelée Dolphin (plus tard rebaptisée
Game Cube). En vérité, il est le chef de projet de
cette nouvelle étape dans la reconquête du marché
des consoles par Nintendo, qui s’est vu entre temps voler
la vedette par Sony et Sega.
Cette console occupe à ce point son temps qu’il
ne supervise que de loin le nouvel épisode de Zelda, Majora’s
Mask, ce qui n’empêche pas ce dernier de faire un
énorme carton et de remettre de façon inespérée
la N64 sur le devant de la scène alors même que la
PS2 est déjà en vente.
Un avant-gout des possibilités graphiques de la Game Cube
Bien entendu, lors du lancement de la Game Cube, Mario sera
de la fête, avec les jeux Super Smash Bros Melee et Super
Mario 128. Quant à la Game Boy Advance, l'autre hit attendu
de Nintendo, elle aura droit à un Super Mario Advance de
facture prévisible mais que les fans ne manqueront pas d'ajouter
à leur collection.
Super Smash Bros Melee (GameCube) et Super Mario Advance (GBA)
Conclusion
A ses début chez Nintendo, Miyamoto rencontre une
jeune fille nommée Yasuko, secrétaire, dont il tombe
amoureux. Les deux tourteraux s’installent dans une petite
maison de campagne non loin des quartiers généraux
de Nintendo. Depuis cette époque, Miyamoto, bien que devenu
très riche, ne se rend au travail tous les matins qu’à
pieds ou sur une petite moto. Yasuko, qui a arrêté
de travailler après leur mariage, lui a donné deux
enfants, avec lesquels il adore jouer à ses propres jeux,
notamment Mario Kart 64.
Bien qu’approchant la cinquantaine, Miyamoto continue de
porter des vêtements ordinaires et des montres en plastique
jaune achetées dans des magasins de jouets. Ce n’est
que depuis peu, et à contre cœur, qu’il a fini
par abandonner la coupe de cheveux au bol (style Beatles des débuts),
parce qu’elle ne correspondait plus à son âge,
mais certainement pas parce qu’elle était démodée.
Le fait de travailler, à son âge, sur des jeux vidéo
ne lui pose pas le moindre problème, et l’argent
rapporté ne représente pas pour une lui une justification
de ce qu’il fait.
Bien que s’inspirant des méthodes Disney, Hiroshi
Yamauchi n’a jamais cherché, comme cela se passe
chez le géant Américain, à éclipser
la personnalité des créateurs les plus inspirés
qu’il emploie. Il ne manque jamais de rendre hommage à
Miyamoto, et de souligner son rôle déterminant dans
le maintien de Nintendo au sommet. Du reste, il semble que les
deux hommes partagent la même ouverture d’esprit.
Sans la propension de Yamauchi à se lancer dans la commercialisation
de produits complètements nouveaux, Miyamoto n’aurait
peut-être jamais pu s’exprimer aussi pleinement.
Petit message de onipif :
Je remercie encore un fois Laurent et toute l’équipe
de groxpixel de m’avoir permis de publier ce dossier. Dans le
futur je le compléterai …mais je dis bien dans le futur
;) Pour l’instant je le trouve complet et très bien ordonné…Evidement
il manque l’après N64, où S. Miyamoto commence
a former de nombreuses équipes pour préparer l’avenir
mais je ne pense pas que cela soit primordial dans ce dossier au point
de le compléter immédiatement…bon, allez, je me
relance dans la rédaction d’un autre article ;)
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